jeudi 4 avril 2013

Design France et qualité


Comment le design produit « made in France » peut-il évoluer ? a-t il un intérêt ? Comment s‘accorde t-il avec le redressement productif et la réindustrialisation française ?

Le constat qui saute à l‘œil est la bipolarisation entre le monde du luxe et celui du moyen/bas de gamme. On observe d‘un coté, le marché juteux des produits de luxe légitimés par leur histoire, leur  statut et dynamisé par les créatifs du marketing, et de l‘autre les produits de grande consommation en concurrence directe avec le « made in China ».

Cette « bipolarité » est bien de chez nous,  comme si l‘industrie à l‘instar de la société française voulait reproduire une barrière infranchissable entre élitisme et volonté farouche de démocratiser.

En France, on démocratise. A titre d’exemple, Renault a ouvert l ‘utilitaire aux familles nombreuses  (Kangoo), rendu accessible le monospace dans toutes les gammes (Espace, Scénic, Twingo). Toujours dans sa démarche logique de constructeur « populaire », Renault s’est engagé dans une course au low cost en produisant la Logan. Cette démarche démocratique et créative se révèle en effet payante dans les périodes d’émulation économique mais qu’en est il aujourd’hui ? En période de crise, la donne change. Aujourd’hui la marque veut démocratiser l‘électrique en le déclinant déjà sur plusieurs produits moyenne gamme, sans avoir un seul produit électrique phare de haute qualité sur lequel s’appuyer. On peut alors s’interroger sur les retombées à terme. En parallèle de cette démocratisation, dans le luxe français, l‘éternel sac Kelly fait la une des journaux sans évolution notable. Le N°5 de Chanel continue encore et toujours à faire rêver. Hermès prône son savoir faire de sellier traditionnel (…) Rien ne change, tout est figé,  c’est la tradition et la légende qui font la force du luxe français.  Eh oui, en France, on « met en conserve » nos élites (oui, mais dans de jolis bocaux).

A contrario, à l‘étranger, le constructeur automobile Tesla et le fabricant d’électroménager Liebherr sont tous deux positionnés haut de gamme, ils ont un réel avantage qualitatif et sont innovants. Tous deux jouissent d’abord d‘une image haut de gamme portée par des consommateurs exigeants. Dans un second temps, ils déclinent leurs innovations en vendant des produits moyenne gamme et démocratisent par ce biais leurs innovations (cool, demain je m ‘achète une Tesla électrique ou un Liebherr moins cher). A l’étranger même les maisons de luxe jouent sur cette haute qualité. A titre d’exemple, La Prairie, marque de cosmétiques suisse, Dr Hauschka, marque allemande (…) Tous prônent un luxe haute qualité intrinsèque au produit, une forte technicité scientifique et de l’innovation dans un esprit contemporain. 

Je vise à montrer que ce manque « de conception globale qualitative »,  de mélange savant entre usage, technologie, durabilité, finition, innovation, éthique, systémique et désirabilité dans l‘offre des produits français (même si nous avons quelques prémices : exagone Motors, DS…) fait cruellement défaut en cette période de rigorisme. 

Et le design produit dans tout cela ? Tout d‘abord pas de souveraineté industrielle sans souveraineté du design. Le design se fait le concepteur et le porteur de toutes ces notions évoquées auparavant. Le design hume ce besoin depuis longtemps. Le designer industriel de France, lui, attend par exemple de pouvoir enfin concevoir un frigo de qualité dont les lignes  s‘apprécieront encore demain, dont les cotés, l‘intérieur, le détail et l‘usage feront écho à l'élégance de sa façade, et dont le logo sera directement bosselé sur la matière comme une « marque inaliénable » au produit.  Mais les financiers de la marque accompagneront-ils le designer dans  cette démarche qualitative ? Les marques françaises oseront-elles une montée en gamme avec une augmentation du prix d’achat, se permettront-elles ainsi d‘apporter de vraies innovations ? L’usager pourra-il enfin avoir le plaisir de revendre le produit français comme une vieille Mercedes, datée d’une époque, en vantant ses mérites d‘hier et d‘aujourd’hui ?

Et la démocratisation ? Pour démocratiser, il faut déjà créer des produits de valeur qui supportent le coût de l‘innovation, pour les décliner dans un second temps sur des produits moyenne gamme. On ne peut pas démocratiser sans rien avoir à démocratiser, or le luxe n'innove pas fondamentalement et  les produits moyenne gamme ne peuvent supporter le coup des innovations optimum !

Alors Mesdames, Messieurs les Français ? Quand trouverons- nous ces « nouvelles classes d‘objets » favorisant « la conception globale qualitive », permettant le courant démocratique entre notre élitisme légendaire et notre simplicité populaire ? 
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